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lundi 21 juillet 2014

The songs of retrieved innocence



Voyage en Italie, classe de quatrième. J'ai une cassette compilant les tubes du moment, surtout en Français. Notamment la terrible Thaï Na Na de Kazero. Mais deux titres retiendront mon attention : C'est comme ça des Rita Mitsouko et Duel au soleil d'Etienne Daho.

N'ayant malheureusement pas, à l'époque, la culture de l'album, j'ai perdu l'occasion de m'offrir Pop Satori. C'est-à-dire beaucoup de temps perdu, de discussions ratées et de situations qui auraient pu changer mon histoire. J'en ai presque des regrets, à bien y penser. Et puis les Rita étaient plus rentre-dedans, quand même (et leur clip de C'est comme ça est toujours super).

Alors qu'en fait, sa musique marie la pop anglaise à la variété française, mais une variété constante de bon goût. Daho, c'est à la fois le Bowie et le Springsteen français : un dandy élégant d'abord et avant tout fan de rock, et un fer de lance national qui ne veut jamais se répéter d'album en album, tout en gardant une intégrité.

Daho a commencé avec l'électronique, le son des années 80. Mais pour y placer des chansons pop mélancoliques aux mélodies inédites. Avec la sortie de La notte, La notte..., son second album, la critique a été visionnaire : "Daho est de la trempe des grands, le genre d'oiseau au-dessus de la mêlée, de ceux qui font une carrière et accompagnent une vie." (dans Best) / "Un succès qui vient casser les cloisons imbéciles." (dans Rock and Folk).

Car ses chansons, une fois remixées, deviennent des tubes hédonistes de discothèques, étrange destin pour des ritournelles censées traduire un certain désarroi de la jeunesse (il faut souligner que les lignes de basse sonnent toujours bien, c'est plus simple pour la transition). "Pour te voir, cinq minutes encore, à Sable d'Or près des dunes" (Tombé pour la France) : le tableau est parlant mais concis, il en cache beaucoup mais l'ambiance est saisie dès le stade de l'adolescence. Forcément, ça touche. Il joue moins avec les mots comme pouvaient le faire Bashung et Gainsbourg, mais ils deviennent tous poétiques dans sa voix discrète et douce.

Puis Daho a suivi les modes des productions sans jamais se départir de ses visions, et aboutit trente ans après La notte... aux Chansons de l'innocence retrouvée. De deux choses l'une : soit l'innocence a été perdue il y a bien longtemps, avant même d'écrire des chansons, soit elle n'est jamais partie, tant le disque semble couler de source. Le single La peau dure et son entêtant riff de guitare sur trois cordes rappelle les La's et la pop "twee" anglaise de Belle & Sebastian. Mais ici, une fois encore, les paroles n'ont rien de naïf.

Aucun titre ne démérite, tous se disputent la première place. Evidemment, les participations de Dominique A. et de Debbie Harry (de Blondie...) boucle le sujet, ces chansons sonnent méchamment rock. Mais globalement un rock noir et blanc de chez Stax, comme Bowie voulait le copier dans Young Americans. Avec des cordes, aussi (cf. Spector, Françoise Hardy, Swinging 60s, Blur, To The End).

Ce disque n'a pas de genre, il les mélange tous, et tous peuvent l'écouter en y prenant plaisir, le fan de Goldman comme celui de Bowie, celui de NTM comme celui de Metallica. A condition de retrouver l'innocence qui abat les murs de l'enfermement volontaire.




vendredi 6 juin 2014

Yeah !


Toutes les boîtes de communication vous le diront : tout produit doit avoir une identité et une personnalité. Comme chacun de nous. Alors que Nirvana, Pixies et Noir Désir étaient nos groupes fétiches de jeunes rebelles, nous avons aussi adoré nous enticher d'un groupe de pop naïf, français, au nom ridicule : les petits lapins.

Des chansons de camp de vacances, en français, anglais ou italien, à chanter à tue-tête autour de trois accords. Ca tombait bien, on commençait à peine la guitare. Complètement opposés au bruit de nos punks chéris, The Little Rabbits profitaient de la vie et chantaient le bonheur des fêtes de campagnes où la bière coulait à flot, ambiance de fêtes foraines. A la campagne, il n'y a ni de bar branché ni de salle de concert.

Et puis, tout comme les Welcome To Julian avec lesquels ils ont dû partager quelques affiches, The Little Rabbits partent aux Etats-Unis, mais en Arizona, une autre campagne. Leur troisième album (Grand public) sonne soudainement très lo-fi, le chant se fait plus indistinct, parfois plus intime. Les formes restent presque les mêmes, mais l'enrobage est différent. Direction un son sale et torturé, plus de petits lapins, mais des petits coyotes.

Yeah !, leur quatrième album, est également un quatrième changement de cap. On remélange le français à l'anglais, mais cette fois ils lorgnent du côté psychédélique des années 60, des musiques de film d'espionnage kitsch, ils ont un DJ metteur en son qui habillent leurs titres de filles en robes de plastique, de cordes un peu disco, de funk molle, de theremin, de jingles radios. Ils reprennent un titre obscur de Gainsbourg (Roller Girl, exactemennt la même ligne de basse que le Devil's Haircut de Beck, enfin, le contraire), on les imagine en costume sur un plateau de télé en noir et blanc entourés de danseuses brindilles. Ou en Beastie Boys frenchies. Quel revirement.

On y trouve Jon Spencer Blues Explosion, Angie Bowie en choriste, Gainsbourg, du hip-hop, des titres hurlés dans un mégaphone, des synthés vintage. Et tout marche miraculeusement. Et presque sans m'étonner, j'ai rapidement ingéré qu'il s'agissait du même groupe qu'à ses débuts. Il faut dire qu'ils ont grandi avec moi, qu'ils m'ont toujours accompagné. Leur nom n'a plus rien de ridicule après quelques écoutes de leurs disques.

A chaque album, leur personnalité a évolué, mais pas leur identité. Il suffit d'écouter leur compilation Radio pour s'en rendre compte : des premiers titres en acoustique de Des faux puits rouges et gris côtoient les chansons parlées en français du très arty La grande musique sans former d'incohérence.



mardi 20 mai 2014

Détroit, Rockhal, Esch-sur-alzette, 06/05/2014


Je ne savais pas trop à quoi m'attendre du concert de Détroit, le nouveau groupe de Bertrand Cantat, ancien chanteur et parolier poétique de Noir Désir. J'avais un peu peur que l'ambiance soit trop feutrée, que la reprise électronique de Avec le temps de Léo Ferré n'arrive pas à égaler Push The Sky Away de Nick Cave & The Bad Seeds vus sur la même scène quelques mois auparavant. Je craignais un public en manque de Noir Désir qui serait trop pressant pour laisser un nouveau groupe s'exprimer. Mais au final rien de tout ça.

Il suffit de regarder la setlist pour comprendre à quel point je me fourvoyais. Plus de la moitié des titres furent des reprises de Noir Désir. Et même d'un peu toutes les périodes. Et même parfois un peu arrangées différemment, comme le passage disco dans Tostaky.

Car le public était finalement là pour ça. Pour Bertrand, pour revivre leurs jeunes années de fans de Noir Désir, après douze ans d'absence et autant de déconfitures (Skip The Use, Shaka Ponk, BB Brunes), le public voulait ce retour, cette flamboyance inégalée. Pas que les groupes que j'ai cités soient mauvais ou malhonnêtes, pas du tout. Ils ne s'élèvent pas dans les mêmes sphères, c'est tout.   L'arrivée sur scène fut pratiquement une ovation, un immense "enfin" sifflé et applaudi par trois mille impatientes et impatients. Cantat est clairement cet atout supplémentaire, même si bien évidemment ses textes ne rivalisent pas avec ceux des écrivains rock que sont Gainsbourg ou Bashung, ils s'approchent de la meilleure chimie entre poésie et rock : du rock de bayou, qui doit tant à Nick Cave et au Gun Club, qui sonne enfin avec cette intraitable langue française. "C'est cool de vous voir." nous lance-t-il au bout de deux ou trois titres. Il était en super forme, le poète maudit, sans problème de voix, joyeux, l'envie d'en découdre. Et le groupe aussi, des musiciens carrés, incapables de faire une erreur, qui connaissent aussi bien leurs larsens que leur gammes. Mais qui n'ont rien à voir avec les membres de Noir Désir. De façon flagrante, Serge Teyssot-Gay manquait. Son jeu piqué à Marc Ribot et aux bluesmen était la deuxième couche qui faisait la spécificité de Noir Désir. Ajoutez Bertrand Cantat qui fait des blagues pas drôles entre les morceaux, j'ai un sale arrière-goût de rock allégé, qui disparaît dès que le chant reprend. Heureusement que Détroit passe par moments. Avec une contrebasse, un violoncelle, des boucles electro, un violon, de la vidéo montée au millimètre, l'ambiance bascule. Elle rappelle que leur disque est réussi. Peut-être pas abouti, la faute aux textes trop abscons pour s'y attacher, mais il n'est ni une parodie de rock ni un changement radical. Il est une suite logique. Pas de reprise de Avec le temps, mais elle aurait été bienvenue, juste avant le premier rappel, histoire de faire encore mieux cohabiter les deux mondes dont l'un restera un souvenir.
Autant dire qu'avec deux concerts en un, des musiciens enthousiastes et un public ravi, l'ennui n'a jamais pointé. Le spectacle est rôdé. Des années de scènes les précèdent, même dix ans d'absence n'en auront raison. Cantat a raison. C'était cool de voir son nouveau groupe.

jeudi 22 mars 2012

Jour de colère


Faire du rock, c'est facile. Je sais de quoi je parle, j'ai moi-même (maître du monde) joué dans plusieurs formations. Enfin, jouer, c'est un grand mot pour mon niveau, puisque je suis de l'école Sid Vicious : aucune formation musicale. Appris sur le tas, grâce aux copains qui montrent quelques plans, expliquent les bases, donne des conseils et des exercices pour travailler. Quel que soit l'instrument (de rock basique, je précise, guitare basse ou batterie voire claviers) que vous choisirez, après un peu d'entraînement et quelques semaines à se faire mal aux doigts aux bras et aux jambes, vous pourrez commencer à jouer (en petit). Oubliez de suite les solos de Jimmy Page ou de John Bonham, concentrez-vous sur l'essentiel : faire sonner le bouzin.

Parce qu'après tout, parmi mes groupes favoris, certains ne savent pas jouer : The Velvet Underground, Joy Division, Pavement, Sonic Youth... Le punk ne vient-il pas de là, en réaction à tous ces types qui font du rock progressif (souvent ampoulé, rempli d'arabesques complexes à reproduire), à ceux qui se lancent dans des solos interminables de blues-rock, à ceux qui groovaient pendant des heures sans se lasser ? Le punk dit non au formatage, non aux études (ou alors "non aux studieux"), c'est pas parce qu'on n'a aucune compétence qu'on a rien à dire. Le jazz aussi vient de là, la rue. Et des disques de ces deux genres ont changé la face du monde.

Il faut de la motivation, des gens qui acceptent de vous accompagner, et un peu d'investissement, ne serait-ce que pour le matériel et le local. Le local, c'est le Graal. Puis il faut trouver sa voie. Le volume, la langue, l'attitude, la mouvance, voire les fringues. Se définir et s'identifier par rapport aux autres losers qui essaient de faire du rock (mais d'une autre catégorie) dans le local adjacent.

C'est là que ça devient intéressant. Parce que pour arriver à sortir du local, jouer sa première scène (de préférence devant un bar un 21 juin), il faut réussir à s'harmoniser, à trouver son son, ce qui fait que le groupe est unique. Même quand il ne s'agit que de reprises copiées-collées, il faut faire passer une personnalité. Le passage obligé, c'est lorsqu'il y a cohésion. Quand ça s'emboîte, chaque protagoniste à sa place, faisant partie d'un tout. Une entité capricieuse dont chacun est responsable, précisément au même instant t. Quand ça sonne et que le rendu est plaisant... je ne peux que comparer ça à un orgasme multiple.

Ce sont les meilleurs moments, autant pour les joueurs que pour les spectateurs. Même si ça arrive pendant le refrain de (I Can't Get No) Satisfaction.

A l'inverse, enregistrer un disque en studio est un véritable crève-coeur. Séparés, attendant des heures pour régler les micros et les amplis, jouant seul, reprenant vingt fois le même passage, se mettre tout nu devant une console aussi froide et déterminée que le HAL de 2001 l'Odyssée de l'espace, le groupe doit se faire humble. Accepté d'être aspiré de sa substance pour en faire un produit, un bout de plastique reproductible à l'infini (mais pas autant parce que bon, ça coûte, un pressage), des fichiers qui tiennent sur une clé USB. C'est un peu traumatisant. D'ailleurs je ne connais pas de musicien qui écoute son disque pour le plaisir. L'accouchement est trop douloureux, ce n'est pas moi, ce n'est pas nous, ce n'est pas notre groupe, c'est le résultat créé par le mix et le master. Personnellement, je préfère réécouter les répètes.

Voilà de quoi il est question dans Dies Irae, le double live de Noir Désir capturé lors de la tournée marathon de Tostaky, de ces moments avant le studio. Et je sais de quoi je parle, j'y étais. Après ça, après ce sommet (la descente de Noir Désir commencera juste après), mes potes et moi n'avions qu'une envie : monter un groupe. Vous voulez de la personnalité, une identité, une cohésion, de la puissance, de la voix tonnante ou frémissante, de la rage, de la reprise copiée-collée meilleure que l'originale, allez-y, servez-vous. Et bonne chance pour le 21 juin, parce que dompter le rock, c'est bien plus difficile que d'en faire.


vendredi 21 novembre 2008

The recklessness


On n'est pas là pour rigoler. Même si, en d'autres circonstances, l'image de ce type semblant revenu de tout, portant l'uniforme du noctambule citadin au milieu d'un sous-bois, peut paraître incongrue voire franchement comique, elle prend une toute autre dimension après l'écoute du contenu. Le noir, pour commencer. Il grignote le peu de blanc qui persiste, il irradie, tel une lumière négative. Et puis le thème : L'imprudence. Celle qui tourne la virée en errance du petit matin ? Celle qui révèle le fond, enfoui sous le vernis de la civilité ?

L'imprudence en tant que perte du contrôle. Tout le disque tend à démontrer cet état, à le chercher. Imaginez-vous devant une section de cordes, des types et des filles qui n'ont eu que rigueur et labeur comme éducation musicale, et tout ça pour atteindre un niveau honnête (la compétition dans cet univers fait froid dans le dos), et votre but, c'est de les utiliser pour déraper, pour plomber, pour souffler sur les chansons, les éteindre, les lancer au vent. De bons musiciens à transformer, de la batterie au piano de Steve Nieve en passant par les violons, même si est intégré un petit grain de folie avec le guitariste Marc Ribot. Bashung n'a pas écrit un opéra rock, même si Othello est cité, mais une symphonie rock. Si les musiciens dérapent, celui qui les écoute ne fait pas mieux. Tétanisé par tant d'arrangements, d'expériences, le corps ne réagit plus, les pensées divaguent. Survaguent. Sur vagues.

Car, bon, c'est Bashung, Bashung et son écriture surréaliste fascinante. Ses paroles coulent tellement loin de la production usuelle que la tentation de les laisser s'exprimer telles quelles semble évidente. Pourtant, je ne les retiens jamais. Je les connais, je peux les dérouler à l'unisson du maître de cérémonie, mais leur sens m'échappe. Seule compte leur sonorité. A l'inverse d'un Léo Ferré qui mettait ses poèmes en musique, Bashung transforme les notes en mots. Même si au final les formes paraissent semblables, les intentions de ces deux déclameurs divergent. Et puis, si sens il y a, chez Bashung, il est toujours double, réversible. Rêves en vers, à l'envers : "Un jour j'irai vers l'irréel".

On n'est pas là pour rigoler, le type en noir rappelle que si il faut parler du Spirit Of Eden de Talk Talk, c'est toujours avec déférence et respect. C'est pour ça que son Imprudence rappelle les constructions alambiquées et cotonneuses de Talk Talk, ces deux disques immenses que sont Spirit et Laughing Stock. Mais qu'est-ce qui fait un grand disque ? Plus qu'une somme de musiciens, ne serait-ce pas la perte du contrôle, laisser la créature gambader ou tout dévaster ? Si celle de Frankestein ne s'était pas évadée, le roman de Mary Shelley aurait-il été réussi ? Pour son Tout sera comme avant, Dominique A. a repris la même équipe que celle de L'imprudence. Raté.

Si ça se trouve je me vautre complètement. Je n'ai rien compris et j'échafaude des idées très loin de la réalité et de la conception de ce disque. C'est pas grave, mes états solides et gazeux ne devraient pas changer à chaque réécoute de cet album. Et puis au diable la prudence.


vendredi 5 septembre 2008

Hawaï


2000. Tandis que le rock s'enlise dans des machines souvent trop grandes pour lui ou décide de jumper sans cesse (quitte à perdre tout sens musical et toute réflexion) et que le rap devient commercial, se muant en r'n'b (NDLR : j'écris avec des gants), la chanson française revient en force grâce notamment à la loi des ratios radios. Je ne lancerai pas de débat à ce sujet même s'il est légitime. Par contre c'est également à cette période que sort le premier album de Java, un quatuor parisien de, mh, disons, rap-musette. Ce que les noms composés peuvent être pratiques parfois. Car oui, le chant est la plupart du temps rappé, et la musique se place dans la grande tradition de la chanson française réaliste de l'après-guerre, basée sur un accordéon omniprésent.

Hawaï se pose en réaction. D'abord comme une réelle ode à une identité carte postale de la France, entre l'appartement de la Mère à Titi de Renaud, les paroles crues de Piaf, l'univers de Gainsbourg (Le Ramsès, véritable hommage à Melody Nelson tant dans le fond que la forme), les films de Bertrand Blier et le cinéma des années 70, et les Français des bistrots et de l'apéro. Ensuite comme un retour aux origines du rap et du rock : la contestation.

Exemple : "De toute façon aujourd'hui, tout l'monde en a rien a foutre des couplets ! Ils veulent juste un refrain à reprendre comme des abrutis." Et oui : dommage que le salace l'emporte parfois, une écriture plus fine aurait assurément fait de cet album une pépite. Cela ne nuit pas pour autant à l'originalité de ce disque, ni à sa bonne humeur, ni à sa colère de gréviste du capitalisme, ni au flow paresseux du chanteur. Hawaï, une destination de rêve qui restera une piqûre de rappel bienvenue à l'encontre de la soupe populaire.



lundi 28 juillet 2008

Surfant sur un steak


Avertissement : les lignes qui suivent n’ont aucun degré d’objectivité. J’ai beau retourner le problème dans tous les sens, je ne vois pas comment me détacher de l’histoire que cet album a écrit dans mes vieilles pages. Il n’est pourtant pas le seul. A cette époque, que je peux étirer entre 1994 et 1997, nombre de disques de qualité furent publiés, y compris par de nouvelles têtes marquantes.

Alors pourquoi celui-ci engendre-t-il plus de nostalgie ? Pourquoi fait-il à la fois office d’atout et de roi de cœur ?

Sans doute parce qu’à cette époque dominée par la noisy, il affirme nos goûts et confirme nos avis. Après un album lumineux (Never So Close, fortement typé Anglais qui pleure sur ses Docs), les Welcome (pardon, Welcome To Julian, décidément) partent pour New-York se faire produire par Nick Sansano, le metteur en son de Sonic Youth et de Public Enemy. Ah ah, exit la noisy. L’album se frotte aux grands, sonne parfois rap, parfois folk, se permet d’être violent, sec, efficace, direct, groovy. « Se permet » car sur cet ultime disque, Welcome To Julian ne s’embarrasse pas de l’humilité souvent mal placée des groupes français. Avec raison. Aucun titre n’est faible ou maladroit. En suivant Sloy et les Thugs dans ce disque urbain et métallique, ils conservent néanmoins leur clarté.

Sans doute aussi parce que leurs concerts sont à la hauteur de leurs compositions. Ils nous motivent, deviennent des exemples. D’ailleurs ne tournent-ils pas avec leurs amis les Little Rabbits, le groupe qui a bercé nos premières grilles de guitare ?

Enfin, sans doute parce que ce Surfing On A T-Bone n’arrête pas de tourner et s’imprimera ainsi indélébilement dans notre vie. Bonus : malgré les années, il ne vieillit pas.