Ce commentaire reprend deux brouillons de deux auteurs en herbe bien trop vieux pour remettre leurs shorts en jean et empoigner leurs basses.
Comme tout art majeur, le rock peut se draper de multiples costumes (et oui, j'aurai pu aussi dire "protéiforme" mais j'avais pas envie, ça faisait trop rock-critic), dont la chanson. Jacques Brel, c'est du rock. La preuve, Divine Comedy, Scott Walker et David Bowie l'ont repris ou lui ont rendu hommage, entre autres. Brel, Neil Hannon, Walker et Bowie ont plusieurs points communs, mais le plus flagrant à mes yeux est leur sens théâtral. Que l'on pourrait également accoler à une foule d'artistes : Genesis, Mr Bungle, Alice Cooper, Black Sabbath, Renaud, Zappa, Dresden Dolls, NTM etc, etc... D'autres en parlent souvent, comme The Police ici ou The Cure là.
J'ai toujours été épaté par le talent de certains à jouer dans leurs clips, à faire plus que de faire la diva rock, même Freddy Mercury et toute sa bande sont bons dans leurs vidéos promos. Les artistes sont-ils tous polyvalents à ce point ? La comédie est-elle forcément complémentaire à la musique ? A-t-on coupé la scène de la bande-son depuis la fin des cabarets ?
J'ai découvert Elliott Smith trop tard. Un an avant que cet idiot ne se suicide (il paraît) ; ça va faire dix ans à peu de choses près que le petit père Elliott s'est foutu deux mortels coups de couteau dans le torse.
Je sais pas toi, mais moi, il continue à me manquer. C'est sûr que s'il était encore parmi nous, il pondrait encore des chansons définitives par paquet de douze, comme ça l'air de rien. Il aurait sorti son douzième album l'été dernier et ça aurait été l'évenement musical de l'année, et on se serait complètement fichu des sorties des nouveaux Bowie, Daft Bidule, Reznor, etc... (insérez ici les albums de l'année dont vous vous contrefoutez).
Je sais pas toi, mais moi, il continue à me manquer. C'est sûr que s'il était encore parmi nous, il pondrait encore des chansons définitives par paquet de douze, comme ça l'air de rien. Il aurait sorti son douzième album l'été dernier et ça aurait été l'évenement musical de l'année, et on se serait complètement fichu des sorties des nouveaux Bowie, Daft Bidule, Reznor, etc... (insérez ici les albums de l'année dont vous vous contrefoutez).
Parce
que ce mec, il te chantait les malheurs du loser, de l'outsider comme
personne d'autre, en y foutant par-dessus le vernis de beauté qui
faisait que forcément le truc était imparable. Parce que Smith était un
loser, un outsider comme moi. Et toi.
Elliott Smith me manque car c'était un ami. Il ne le savait pas, mais il est un de mes amis chers, dont je pleure encore la disparition. Alors que Kurt Cobain et Jeff Buckley n'ont jamais eu ce privilège. Trop charismatiques, trop défoncés, trop talentueux, trop iconiques. Elliott est un ami car il me ressemble, et tout ce qu'il a chanté le prouve.
Pourtant, une fois qu'on veut jouer du Elliott Smith, tout comme la chanson de variété de Michel Delpech qu'on trouvait naze à l'âge dix ans, on perd ses moyens. Il ne suffit pas d'aligner quatre accords ou quelques difficultés Led Zepeliniennes, c'est au-delà. C'est tordu, c'est nouveau, c'est non-conventionnel. Elliott était un auteur, compositeur et un interprète de qualité supérieure.
Figure 8 est mon premier Smith, et je n'avais rien entendu d'aussi mélodique et brillant depuis les Beatles et les Smiths. Il est tout simplement impossible de ne pas succomber à ces chansons, ni à celles de ses autres albums, tous beaux et bons, un peu différents les uns des autres, parfois dépouillés, parfois élaborés et foisonnant d'instruments, comme ici. Comme chez les Smiths, Elliott parle de l'intime, du vide, des peurs, mais de loin, se cachant derrière sa guitare virevoltante et ses harmonies irrésistibles, comme si au bout du compte, il pensait que tout ceci était une blague. Toutes ces saloperies d'insomnies, de parents absents, de boule serrée au fond du ventre et qui ne veut pas partir, Elliott Smith a décidé de les mettre en scène. Parce qu'Elliott, c'est un peu Bruce Springsteen qui aurait été timide. Au lieu de faire de la scène un appel à la communion, il transforme sa chambre en décor de théâtre et invite tout le monde. Avant d'avoir pu être un YouTuber, avant de pouvoir devenir la star mondiale qu'il méritait d'être. Il n'était pas une bête de scène comme Eminem ou Dave Grohl, et jamais il n'aurait pu avoir la prestance de Scott Walker ou de Brel. Mais il avait la poésie et le charme de Charlie Chaplin.
Tout va bien. On continue
nos vies merdiques et personnellement, je persiste à raccourcir la
mienne en fumant le plus le clopes possibles dans une journée, histoire
de crever rapidos. Mais merci Elliott, tu auras rendu ma vie un peu plus
supportable. Grâces te soient rendues.
Chro à quatre mains par Jy et Bubble.